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pattybijoux, Posté le jeudi 24 septembre 2015 10:06
A Monsieur le Chevalier de Boufflers
Croyez qu’un vieillard cacochyme,
Chargé de soixante et douze ans,
Doit mettre, s’il a quelque sens,
Son âme et son corps au régime.
Dieu fit la douce Illusion
Pour les heureux fous du bel âge ;
Pour les vieux fous l’ambition,
Et la retraite pour le sage.
Vous me direz qu’Anacréon,
Que Chaulieu même, et Saint-Aulaire,
Tiraient encor quelque chanson
De leur cervelle octogénaire.
Mais ces exemples sont trompeurs ;
Et quand les derniers jours d’automne
Laissent éclore quelques fleurs,
On ne leur voit point les couleurs
Et l’éclat que le printemps donne :
Les bergères et les pasteurs
N’en forment point une couronne.
La Parque, de ses vilains doigts,
Marquait d’un sept avec un trois
La tête froide et peu pensante
De Fleury, qui donna les lois
A notre France languissante.
Il porta le sceptre des rois,
Et le garda jusqu’à nonante.
Régner est un amusement
Pour un vieillard triste et pesant,
De toute autre chose incapable ;
Mais vieux bel esprit, vieux amant,
Vieux chanteur, est insupportable.
C’est à vous, ô jeune Boufflers,
A vous, dont notre Suisse admire
Le crayon, la prose, et les vers,
Et les petits contes pour rire ;
C’est à vous de chanter Thémire,
Et de briller dans un festin,
Animé du triple délire
Des vers, de l’amour, et du vin.
acteursactrices, Posté le samedi 26 septembre 2015 08:26
À Samuel Bernard
C’est mercredi que je soupais chez vous
Et que, sortant des plaisirs de la table,
Bientôt couchée, un sommeil prompt et doux
Me fit présent d’un songe délectable.
Je rêvais donc qu’au manoir ténébreux
J’étais tombée, et que Pluton lui-même
Me menait voir les héros bienheureux
Dans un séjour d’une beauté suprême ;
Par escadrons ils étaient séparés ;
L’un après l’autre il me les fit connaître.
Je vis d’abord modestement parés
Les opulents qui méritaient de l’être :
Voilà, dit-il, les généreux amis ;
En petit nombre ils viennent me surprendre ;
Entre leurs mains les biens ne semblaient mis
Que pour avoir le soin de les répandre.
Ici sont ceux dont les puissants ressorts,
Crédit immense, et sagesse profonde,
Ont soutenu l’état par des efforts
Qui leur livraient tous les trésors du monde.
Un peu plus loin, sur ces riants gazons,
Sont les héros pleins d’un heureux délire,
Qu’Amour lui-même en toutes les saisons
Fit triompher dans son aimable empire.
Ce beau réduit, par préférence, est fait
Pour les vieillards dont l’humeur gaie et tendre
Paraît encore avoir ses dents de lait,
Dont l’enjouement ne saurait se comprendre.
D’un seul regard tu peux voir tout d’un coup
Le sort des bons, les vertus couronnées :
Mais un mortel m’embarrasse beaucoup ;
Ainsi je veux redoubler ses années :
Chaque escadron le revendiquerait.
La jalousie au repos est funeste :
Venant ici quel trouble il causerait !
Il est là-haut très heureux ; qu’il y reste.